Fonge & florule

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Le" Clitocybe géotrope

Clitocybe geotropa (1) blog.jpg

Photos Yvan Bernaer

 

 

Le Clitocybe géotrope est une vieille connaissance. Sa silhouette, son port, sa couleur, son apparition tardive dans les bois de feuillus calcaires ou dans l'herbe des bords de route me sont familiers. Mais aujourd'hui, le désir m'envahit d'un arrêt sur image, d'une méditation sur cette fidèle impression mêlée d'émotion, sur les noms dont il est affublé, un peu à tord et à travers.

Quand il est jeune, il émerge des feuilles mortes ou de l'herbe verte, avec son petit chapeau convexe, circonscrit d'une marge enroulée vers l'intérieur et doté d'un gros mamelon obtus, fiché sur un pied robuste, droit et central, clavé à la base. Le pied et le chapeau sont soudés en parfaite continuité par les lames décurrentes, et cette sensation sculpturale se trouve renforcée par la teinte générale chamoisée.

Avec l'âge, le chapeau s'agrandit considérablement, se creuse en entonnoir tout en gardant son mamelon charnu. Ce grand et beau champignon, si strict dans son maintient et si fidèle dans sa couleur, inspira le peintre Roland Cat qui le mit en scène dans La maison vide1 (1983).

Ses noms, pour pittoresques qu'ils soient, n'en dénotent pas moins des perceptions subjectives sujettes à caution. L'épithète géotrope (du grec  : terre, et tropê : action de se retourner), concernerait la marge à enroulement prononcé et prolongé. Quant à l'étymologie de clitocybe (du grec Klitos : pente, et kubê : tête), si elle sied à nombre d'espèces de ce genre à chapeau comme déjeté sur le côté, elle n'est guère adaptée à notre champignon au maintient impeccablement droit. Enfin le nom vernaculaire Tête de moine signalerait la ressemblance de son chapeau mamelonné chamois roussâtre avec la tête chauve d'un moine.

Le Clitocybe géotrope : Clitocybe geotropa2, est un comestible de choix qui supporte les faibles gelées de fin d'automne.

 

(17 décembre 2015)

 

Il est possible de voir ce tableau sur Internet.

Aux dernières nouvelles, le Clitocybe géotrope se nomme Infundibulicybe geotropa (Bulliard) Harmaja (du latin infundibulum : entonnoir). Ce nom de genre lui convient beaucoup mieux, certes, et réhabilite cette musicale étymologie, que les mycologues se plaisaient à chanter dans le fameux binôme : Clitocybe infundibuliformis – devenu stupidement Clitocybe gibba par règle de priorité (gibba signifiant bossu, c'est-à-dire à peu près le contraire de creusé en entonnoir). Notons que Clitocybe gibba s'appelle maintenant Infundibulicyce gibba... mais ce n'est pas aussi chantant et tournoyant que le vibrato Clitocybe infundibuliformis... dont la perte demeure inconsolable.

 

 

Clitocybe geotropa (2) blog.jpg



06/01/2016
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